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jeudi 21 novembre 2024

S.H Nasr : «La relation entre l’existence et Dieu n’est pas une simple relation logique»

Auteur d’une cinquantaine d’ouvrages sur l’islam, la sagesse et la tradition ésotérique, Seyyed Hossein Nasr a été professeur d’études islamiques à la George Washington University. Une œuvre marquée par les aspects doctrinaux et philosophiques de l’islam. Extraits.

La doctrine centrale, qui concerne la nature ultime de la réalité, a été communément appelée wahdat al-wujüd ou unité (transcendante) de l’Être. Cette doctrine cardinale, qui n’est pas le panthéisme, ni le pan-enthéisme, ni le mysticisme naturel, comme l’ont appelée certains orientalistes occidentaux, est la conséquence directe de la Shahâdah. Elle affirme qu’il ne peut y avoir deux ordres de réalité, ou d’être, complètement indépendants, ce qui serait pur polythéisme, ou shirk. Il en résulte que dans la mesure où une chose a de l’être, cet être ne peut être que celui de l’Être absolu. La Shahâdah commence, en effet, avec le « la », ou négation, afin d’absoudre la Réalité de toute altérité et de toute multiplicité. (Islam, perspectives et réalités, Seyyed Hossein Nasr)

La relation entre l’ordre de l’existence et Dieu n’est pas une simple relation logique selon laquelle, lorsqu’une chose est égale à une autre, la seconde est égale à la première. Par ce mystère qui réside au cœur de la création elle-même, tout est, en essence, identifié à Dieu tandis que Dieu transcende infiniment tout. Comprendre cette doctrine par l’intellect, c’est posséder une intelligence contemplative; la réaliser pleinement, c’est être un saint qui, seul, voit« Dieu partout ».

A la doctrine de l’Unité de l’Être succède en importance celle de l’Homme Universel (al-insân al-kàmil) qui lui est concomitante. L’homme, tel que l’envisage le Soufisme, n’est pas simplement « un animal rationnel », ainsi qu’on le comprend habituellement, mais un être qui possède en lui tous les états multiples de l’être, bien que la plus grande majorité des hommes ne soient pas avertis de l’ampleur de leur nature et des possibilités qu’ils ont en eux. Seul le saint réalise la totalité de la nature de l’Homme Universel et, par-là, devient le miroir parfait dans lequel Dieu se contemple. Dieu a créé le monde afin qu’il puisse être connu, selon le hadith sacré : «J’étais un trésor caché ; J’ai désiré être connu et c’est pourquoi J’ai créé le monde.»

L’Homme Universel est le miroir dans lequel les Noms divins et les Qualités divines sont pleinement reflétés et à travers lequel la finalité de la création s’accomplit. Par les états multiples de l’être qu’il porte en lui, l’homme est à la ressemblance de l’Univers et c’est pour cette raison qu’on l’appelle un microcosme, l’Univers étant le macrocosme. Tous deux reflètent en leur être et en leur symbolisme le méta-cosmos qui est leur source. (Islam, perspectives et réalités, Seyyed Hossein Nasr)

(…)

La tradition philosophique de l’Islam, bien que d’une grande diversité et d’une grande richesse, est caractérisée par certains traits spécifiques, dont la signification particulière doit être pleinement comprise si l’on veut la saisir et en apprécier la portée universelle. Cette philosophie respire dans un univers religieux où un livre révélé et une prophétie dominent l’horizon. Il s’agit donc d’une « philosophie prophétique », quel qu’en soit le sujet.  De plus, c’est une philosophie qui, en conformité avec la perspective islamique, est fondée sur l’intellect en tant que faculté surnaturellement naturelle dans l’homme, laquelle est un sacrement qui, s’il en use correctement, conduit aux mêmes vérités que celles révélées par la prophétie. (L’Islam traditionnel face au monde moderne, Seyyed Hossein Nasr).

Seyyed Hossein Nasr

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