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jeudi 21 novembre 2024

Mohamed Bajrafil : Pour une révolution des mentalités !

« Le drame tragique qui a frappé les Comores après le crash d’un avion doit susciter un éveil des consciences. » écrit l’ambassadeur des Comores à l’UNESCO, le docteur Mohamed Bajrafil. Une tribune à lire sur Mizane.info.

Un crash aérien a eu lieu samedi dernier au large de l’île comorienne de Mohéli – faisant 14 victimes, dont 12 passagers et l’équipage. C’est un drame d’autant plus grave, pour les Comoriens, que non seulement nous sommes peu nombreux – on atteint à peine le million si l’on prend en compte la diaspora comorienne en France – mais aussi et surtout tout le monde connaît tout le monde, tout le monde est lié à tout le monde.

Rien ne doit, ni ne peut justifier de la part de personne quelques négligences que ce soit; encore moins du mépris, face à cette catastrophe. Nous ne pouvons, évidemment, pas ne pas penser au Yéménia, en 2009.

Il est vrai qu’habitués aux alhamdu lillah, devenus l’excuse à tout, l’équivalent du maktūb en d’autres contrées, nous cherchons rarement à établir les responsabilités des uns et des autres dans les différents drames et problèmes qui nous arrivent.

Cela va des kwassa-kwassa qui conduisent à la mort des centaines de personnes, par an, dont des jeunes et des enfants, à la famille récalcitrante au traitement d’un des siens à l’hôpital et qui le voit mourir sous ses yeux, pour ensuite en vouloir au monde. Il est venu le temps d’apprendre collectivement et individuellement à assumer nos responsabilités. Bien plus qu’une révolution politique, nous avons besoin d’une révolution des mentalités.

Mohéli, l’île nature des Comores

Et ce n’est pas en vociférant sur les réseaux sociaux que nous y parviendrons. Encore moins en faisant de la politique politicienne. Certains, notamment dans la diaspora, sont, déjà, en train d’agir dans ce sens. Je pense à l’initiative de certains jeunes entrepreneurs appelée Komlink.

On n’en entend pas parler car une forêt qui pousse fait moins de bruit qu’une noix de coco vide qui tombe. Soyons nombreux à agir en forêt, nous changerons et le destin du pays et le nôtre. Les dirigeants d’un peuple sont souvent à son image, dixit une parabole prophétique.

Le temps n’est ni aux polémiques stériles, ni aux insultes, encore moins aux accusations gratuites. Il est à l’impérieuse et urgente prise de conscience collective et individuelle que nous ne pouvons plus continuer à agir ainsi.

Quand au Japon, par exemple, quelqu’un faillit à une quelconque mission, il s’en prend à lui-même au point, des fois, de se faire hara-kiri, endossant individuellement et personnellement la responsabilité, de l’échec, aux Comores, c’est la famille, le village et la région dont on est issu qui partent demander, voire, exiger la libération de quelqu’un accusé par la justice de détournements ou de malversations. Donc, personne n’est jamais coupable de rien. Et on grandit ainsi !

Dans nos familles, il y en a toujours un sur qui tout le monde compte pour la faire fonctionner, laissant de côtés les responsabilités des autres. Ce sont souvent les mêmes, les aîné(e)s, qui trinquent. C’est très africain, on me dira. Mais, aux Comores, c’est décuplé.

Nos gouvernants, notre société doivent penser à créer de l’espoir chez les plus jeunes et assurer aux plus âgés parmi nous une vie décente et une santé digne. Nous ne sommes ni pauvres, ni idiots. Nous sommes un des peuples les plus lettrés du monde, au sens de gens qui savent lire et écrire.

Je ne connais, en effet, personne de ma génération, entre la trentaine et la petite quarantaine, qui ne sache pas lire et écrire en arabe et en français. C’est loin d’être le cas partout dans le monde, notamment dans le monde afro-arabe auquel nous appartenons. C’est une force incroyable ! Soyons-en conscients pour pouvoir avancer.

Apprenons, pour cela, à n’attendre ni Messie, ni je ne sais qui. On nous parle d’hydrocarbures qui existeraient à des quantités incommensurablement grandes dans nos eaux territoriales et de bien d’autres richesses, comme la beauté inégalée de nos plages et paysages. Il suffirait qu’un de ces secteurs se développe pour faire de notre pays un paradis. Cependant, la plus grande richesse que nous ayons, c’est notre jeunesse, c’est nous donc.

Engageons-nous, loin du foin et du charivari des uns et des autres. Prenons nos responsabilités pour d’abord notre intérêt propre, ensuite pour l’intérêt du grand nombre. L’Océan indien, notre mer, ne doit pas devenir notre cimetière, à cause de notre incurie. Toutes mes condoléances les plus sincères aux familles éplorées, au peuple comorien dans son ensemble et mes prières pour ces martyrs de la mer.

Mohamed Bajrafil

 

 

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