©Mizane.info
L’Union Internationale des Ouïghours a organisé samedi 12 novembre un congrès de plusieurs jours consacré aux crimes contre l’humanité ainsi que les disparitions forcées en Chine vécus par les Ouïghours. « Les objectifs de cette conférence sont de soulever les questions qui se présentent de façon de plus urgente à l’attention internationale quant à la situation des droits humains en Chine » ont expliqué les organisateurs à Mizane.info. Un compte-rendu signé Gianguglielmo Lozato.
Le principal représentant des Ouïghours en France et à travers le Monde a délibérément choisi la date du 11 novembre comme date inaugurale du neuvième Congrès Ouïghour International. Le meeting s’est déroulé sur Paris à deux pas de l’Assemblée nationale et dans le prestigieux auditorium du CEDIAS. L’objectif : rappeler les violences et le traitement dont font l’objet les Ouïghours, une minorité turcophone en très grande majorité musulmane, opprimée en Chine.
L’épicentre de ce sommet a été incontestablement le samedi 12 novembre avec une matinée chargée au centre de conférences de Charenton-le-Pont puis le départ du convoi pour le septième arrondissement de Paris.
« Liberté pour les Ouïghours »
Quelques politiques ont fait le déplacement. Parmi eux, la députée MODEM Maud Petit qui a tenu un discours d’une grande humanité. Le député et conseiller régional en écologie Philippe Bouriachi était aussi présent, comparant la situation chinoise des Ouïghours avec l’Apartheid sud-africaine. « Chaque citoyen est un soldat » a-t-il déclaré avant d’entonner un « Vive le Peuple Ouighour ! Liberté pour les Ouighours ! ». L’euro-député islandais Birgir Thorarinsson a rappelé pour sa part les instances internationales à leur devoir.
Puis est venu le tour du président fondateur de Justice sans Frontières François Deroche, qui a su haranguer la foule d’un ton grave. « Pendant la Shoah beaucoup avaient répondu « nous ne savions pas ». Mais maintenant nous n’avons pas d’excuses puisque nous avons l’image, le son, la vidéo et quatre millions de gens en camp de concentration ».
Des propos dont l’esprit a été relayé par ses collaborateurs Abdelmadjid Mnari et Youssef Chihab (respectivement directeur des départements Moyen_Orient/Afrique du Nord de l’AFD, directeur porte-parole de l’AFD Belgique). Ce dernier précisant que leur organisation avait constaté l’utilisation d’Interpol par l’État Chinois, en référence à l’incarcération d’un ressortissant ouïghour au Maroc.
Trafic d’organes et détentions arbitraires
Parmi les autres participants, signalons Madame Tran Nghi, présidente créatrice de l’association Jeunes Vietnamiens de Paris. Cette française d’origine vietnamienne initiant son temps de parole par « je suis enfant des boat-people » a affirmé que « parler c’est informer » et a lancé un « appel aux Nations qui ont proclamé tous les hommes libres et égaux ».
Quatre hauts représentants ouïghours ont pris la parole. Enver Tohti, chercheur en médecine a dénoncé avec haute précision les atrocités du trafic d’organes. Le second président de ce que l’on désigne officiellement par Gouvernement du Turkestan Oriental en Exil, a procédé passionnément à plusieurs mises en garde quant aux visées chinoises actuelles, insistant sur la bonne entente obligatoire et la collaboration impérative des États démocratiques pendant qu’il en était encore temps.
C’est justement le caractère urgent qui a prédominé la journée du dimanche 13 novembre consacré à une réunion entre ouïghours suivie par une visio-conférence d’où sont apparus des visages familiers de la cause ouïghoure comme la vice-présidente du gouvernement en exil Mahira Ghopour se connectant depuis le Canada ou Erkin Rozi depuis la Norvège, entre autres.
Que faire ?
Erkin Ablimit a souligné que depuis 1949 il était très difficile d’expliquer la situation aux citoyens chinois basés en Chine ou à même à l’étranger, étant donné l’accoutumance aux pouvoirs autoritaires. Cette normalisation de la violence politique a facilité une escalade des étapes génocidaires par tranches d’une quinzaine d’années à chaque fois, a-t-il expliqué, soulevant le risque imminent d’une extinction des Turcs de Chine. Les conséquences tragiques des détentions arbitraires ont été également évoquées.
Pour faire face à cette politique génocidaire, les responsables ouïghours misent sur une politique d’information et de conscientisation des états.
Envoi de rapports à plusieurs délégations diplomatiques, resserrement des liens avec les ONG, établissement de comités partout où résident des exilés ouïghours afin de constituer des listes électorales en vue d’élire un représentant par pays d’accueil enregistré. Cette réorganisation électorale locale de la dynamique ouïghoure se traduire par l’élection d’un président pour un mandat de quatre ans au suffrage universel.
L’islam au cœur de la lutte idéologique chinoise
Selon les représentants ouïghours, en dehors du génocide en lui-même, c’est l’étouffement de la spiritualité, et donc d’un potentiel esprit critique, qui est recherché par les autorités chinoises. Avec pour pendant la diabolisation de l’Islam censée justifier la politique répressive chinoise auprès de l’opinion publique occidentale.
La propagande chinoise présente le peuple ouïghour comme un vivier d’éléments radicalisés alors que musulmans, chrétiens, chamanistes et animistes ont toujours vécu ensemble simplement en tant que ouïghours, ont poursuivi les responsables ouïghours. Cette propagande affecterait même les autres confessions ouïghoures. Des églises asiatiques basées à l’étranger se méfieraient aujourd’hui des catholiques ou protestants ouïghours les qualifiant de terroristes, selon des témoignages. Sur ce plan, Erkin Ablimit avoue devoir faire preuve de la plus grande patience pour plaider sa cause en expliquant aux représentants occidentaux qu’il croise et que le mot islam effraie que c’est de l’ignorance et du mensonge dont il faut avoir peur.
Gianguglielmo Lozato