Zemmour à son meeting du 27 mars 2022 au Trocadéro (Paris).
Le polémiste d’extrême droite et ancien candidat à l’élection présidentielle Eric Zemmour avait été condamné en France « pour provocation à la discrimination et haine religieuse envers la communauté musulmane française ». Après le rejet du pourvoi en cassation, la Cour européenne des droits de l’homme a confirmé la condamnation. Focus sur une décision judiciaire.
Pas de sursis pour Eric Zemmour. Dans son dernier arrêt la CEDH a rejeté l’invocation de la liberté d’expression prétexté par l’ancien journaliste. « Dans l’affaire Zemmour c. France (requête no 63539/19), la Cour européenne des droits de l’homme dit, à l’unanimité, qu’il y a eu : Non-violation de l’article 10 (liberté d’expression) de la Convention européenne des droits de l’homme. »
Zemmour : « C’est du djihadisme. Donc c’est l’islam »
Les faits incriminés remontent il y a six ans. Le 16 septembre 2016, Eric Zemmour est invité dans l’émission télévisée « C à vous » (France 5) pour la promotion de son livre intitulé « Un quinquennat pour rien ». Il y prononcera 5 déclarations qui lui vaudront des poursuites judiciaires par l’association Coordination des appels pour une paix juste au Proche-Orient (CAPJPO) devant le tribunal correctionnel de Paris.
Questionné sur le fait de savoir « s’il y a des musulmans en France qui vivent dans la paix, qui n’interprètent pas à la lettre les textes du Coran, qui sont totalement intégrés », Zemmour répond « non ». Le polémiste ira plus loin. « Les soldats du djihad sont considérés par tous les musulmans, qu’ils le disent ou qu’ils ne le disent pas, comme des bons musulmans, c’est des guerriers, c’est des soldats de l’Islam », expliquera-t-il dans l’émission.
« L’invasion musulmane » vue par Zemmour
Questionné sur le terrorisme, Eric Zemmour dira : « Non mais c’est pas du terrorisme c’est du djihadisme. Donc c’est l’islam ». Le président de Reconquête a poursuivi son offensive rhétorique antimusulmane. « Nous vivons depuis trente ans une invasion, une colonisation, qui entraîne une conflagration ».
« Dans d’innombrables banlieues françaises où de nombreuses jeunes filles sont voilées, c’est également l’Islam, c’est également du djihad, c’est également la lutte pour islamiser un territoire qui n’est pas, qui est normalement une terre non islamisée, une terre de mécréant. C’est la même chose, c’est de l’occupation de territoire ».
Les derniers propos de Zemmour retenus contre lui sont les suivants : « Je pense qu’il faut leur [les musulmans vivant en France] donner le choix entre l’Islam et la France (…) s’ils sont Français ils doivent, mais c’est compliqué parce que l’islam ne s’y prête pas, ils doivent se détacher de ce qu’est leur religion ».
La décision surprenante de la cour d’appel
Le 22 juin 2017, le tribunal correctionnel considéra que les cinq passages poursuivis relevaient de l’incrimination prévue à l’article 24 de la loi de 1881 et condamna le requérant à une peine d’amende de 5 000 euros (EUR), pour provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une religion.
Mais de manière assez surprenante, la cour d’appel de Paris, dans son arrêt du 3 mai 2018, n’a confirmé que les 4e et 5e déclarations, et baissé l’amende à 3000 €. Après s’être pourvu en cassation, la Cour a rejeté ce pourvoi par un arrêt du 17 septembre 2019.
La CEDH a donc confirmé l’appel dans son arrêt. Les juges ont estimé « que les propos du requérant contenaient des assertions négatives et discriminatoires de nature à attiser un clivage entre les Français et la communauté musulmane dans son ensemble ».
« La Cour considère que ces propos ne se limitaient pas à une critique de l’islam mais comportaient, compte tenu du contexte d’attentats terroristes dans lequel ils s’inscrivaient, une intention discriminatoire de nature à appeler les auditeurs au rejet et à l’exclusion de la communauté musulmane. »
Comme le précise l’arrête de la CEDH, cet arrêt n’est pas définitif. Zemmour peut dans un délai de trois mois demander le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre de la Cour.