Edit Template
mardi 03 décembre 2024

Ahmad Kanté : et si « islam » était l’autre nom de l’Alliance et du Salut ?

Ahmad Kanté : et si « islam » était l’autre nom de l’Alliance et du Salut ? Mizane.info

Imam, écrivain et conférencier, Ahmad Kanté nous propose sur Mizane.info une lecture islamo-biblique abondante, cohérente et convergente de la notion d’Alliance et de salut.  

Une mauvaise compréhension de ce qui lie le prophète Muhammad (bpslf) à ses prédécesseurs et le Coran aux Livres révélés antérieurs a des conséquences désastreuses sur la communauté prophétique et la communauté scripturaire entre le judaïsme, le christianisme et l’islam. En vérité, le Coran nous donne une grille d’interprétation à travers laquelle il devient clair que l’islam est l’autre nom de l’Alliance et du Salut que Dieu a proposés à l’humanité.

Une des causes de la grande confusion qui règne au sujet de l’Alliance Abrahamique universelle vient de ce que l’islam est considéré comme une religion à côté du judaïsme et du christianisme et qu’il serait celle des Arabes descendants d’Ismaël (paix sur lui) ou tout simplement, celle des « musulmans 2» ! Or, l’on est fondé à se poser la question de savoir : comment peut-on s’imaginer que le vrai et unique Dieu soit la source de religions révélées différentes à la même humanité ?

La seule façon rationnelle de sortir de ce dilemme ou de cette grande confusion, c’est de tenir pour vrai que Dieu a fait don à l’humanité d’une seule Religion sous forme d’Alliance, assortie d’obligations et de promesses, avec pour chaque horizon temporel, la forme qu’elle revêt sans que le fond ou le contenu de base ne change. C’est ainsi qu’il existe des Livres révélés et des prophètes (paix sur eux) mais pour une seule Religion : adorer le vrai et unique Dieu ; obéir à Ses commandements.

C’est dans ce sens qu’il faut comprendre ce verset du Coran : « Certes, la religion pour Dieu, c’est l’islam… » (Coran 3 : 19) Dans certaines traductions, c’est la « religion auprès » de Dieu. Au demeurant, cela veut dire que la vraie religion, celle que Dieu considère comme vraie, c’est l’islam. D’autant plus que c’est l’islam que Dieu dit avoir parachevé dans un des derniers versets révélés au prophète Muhammad (bpslf) :

« (…) Aujourd’hui, J’ai parachevé votre religion, et Je vous ai comblé de Mon bienfait et J’ai agréé pour vous l’islam comme religion. »
(Coran 5 : 3).

Le sens de l’islam transhistorique

Dans cette perspective, il est tout à fait justifié que Ce même vrai et unique Dieu qui a fait don à la même humanité de cette « Religion-Alliance-Salut » qu’est l’islam dise qu’en dehors d’elle, nul ne saurait être considéré comme y appartenant :

« Et quiconque désire une religion autre que l’islam, ce ne sera pas accepté de lui, et il sera dans l’au-delà, parmi les perdants. » (Coran 3 : 85).

Chose très importante, voire décisive à noter dans ce registre, c’est que ce verset, loin d’être une sorte de condamnation pour dire que hors de la religion des musulmans qui s’appelle « islam », point de salut, vient juste après une profession de foi unitaire que le prophète Muhammad (bpslf) a reçu ordre de proclamer :

« Dis3 : ‘Nous croyons en Dieu, en ce qu’on a fait descendre sur nous, en ce qu’on a fait descendre sur Abraham, Ismaël, Isaac, Jacob, et les asbât4et à ce qui a été donné à Moïse, à Jésus, aux prophètes de la part de leur Seigneur. Nous ne faisons aucune différence5 entre eux et c’est à Lui (Dieu) que nous sommes soumis’ ». (Coran 3 : 84). Voir aussi (Coran 2 : 136).

Déjà, il faut noter que ça ne ferait pas sens de traduire le terme « muslimûn » de ce verset par « musulmans », ce qui donnerait « C’est à Lui que nous sommes musulmans » ! Nous voyons comment le Coran mentionne une communauté de foi entre le prophète Muhammad (bpslf), tous les prophètes (paix sur eux) et notamment Abraham, Ismaël, Isaac, Jacob et ses douze fils dont sont issus les Tribus d’Israël. Trois choses ressortent des versets susmentionnés : i) la foi en Dieu ; ii) la foi en la Révélation faite à tous les prophètes ; iii) la soumission à Dieu.

Dit autrement, l’islam est la religion qui consiste à croire au vrai et unique Dieu Qui a parlé à l’humanité à travers des prophètes (paix sur eux) et des Livres et à accepter d’observer Ses commandements. C’est pourquoi, pour Dieu, il existe une seule religion ou si on reprend le verset susmentionné, c’est l’islam la religion qu’Il agrée.

Tout cela est en parfaite cohérence avec les Testaments d’Abraham et de Jacob (paix sur eux) que nous avons mentionnés plus haut où les mots « islam » et « muslimûn » reviennent (Coran 2 : 131-133). C’est ainsi que dans le Coran, tous les prophètes et ceux qui les ont suivis sont qualifiés de « muslimûn », ceux qui ont accepté l’islam comme religion, c’est-à-dire, d’entrer dans une Alliance avec Dieu assortie d’obligations et de promesses. On est loin d’un islam, religion des Arabes ou des Musulmans ou encore Mahométans.

« ‘Ahd » et « mîthâq » : les deux notions clés de l’alliance

Dans le Coran, deux termes renvoient au thème de l’Alliance : « ‘ahd » et « mîthâq ». Une recension exhaustive permet de voir que même si dans de rares cas, les deux termes sont interchangeables, « ‘ahd » peut être traduit au sens d’Alliance6 en tant que telle, à savoir, le contenu de ce que Dieu propose à l’humanité : i) L’adorer en tant que vraie et unique Divinité ii) observer Ses Commandements.

La compréhension coranique de la première expression renvoie à la foi en un Dieu unique sans associé ni partenaire et Qui transcende Sa création, alors que la seconde nous dit que Dieu communique Ses commandements à travers des Livres révélés et des prophètes (paix sur eux) et s’attend à ce qu’ils soient observés.

Le terme « mîthâq », lui, exprime beaucoup plus l’accord ou l’acceptation des termes de l’Alliance par un individu ou un groupe. Pour faire le tour complet du thème de l’Alliance à la lumière du Coran, il faudra intégrer les concepts de « naqdz », de « wa ‘d » et de « wa ‘îd »7. On se retrouve ainsi avec les composantes du thème de l’Alliance suivantes à la lumière du Coran :

« ‘ahd », Alliance venant de Dieu : adorer le vrai et unique Dieu ; observer Ses Commandements (Sa Loi) ;

« mîthâq », Accord/Acceptation donné par un individu ou un groupe de respecter les termes de l’Alliance ;

« naqdz », Violation/transgression des commandements de Dieu ;

« wa ‘d », Promesse de bénédiction et de Salut pour ceux qui respectent les termes de l’Alliance ;

« wa ‘îd », « Promesse » de sanction et de damnation pour ceux qui rejettent l’Alliance ou la transgresse gravement (idolâtrie et péchés majeurs).

Ce qui précède laisse comprendre une chose capitale à savoir que ce n’est pas par hasard que le Coran insiste sur ceci qu’Abraham (paix sur lui) ne peut être « récupéré » ni par ceux qui se disent « nasâra » (chrétiens) ni par les « yahûd » (juifs). Il est tout simplement un « muslim »8 qui adore exclusivement l’unique et vrai Dieu tout en observant Ses commandements.

C’est à travers le terme « umma » que le Coran nous fait comprendre ceci que l’Histoire de l’Alliance est une succession de « umam » (pluriel de « umma ») jusqu’à la dernière qui est incarnée par Muhammad (bpslf), le sceau des prophètes et dernier messager de Dieu et régie par le Coran, dernier Livre révélé. Les membres de chaque « umma » sont alors mis à l’épreuve de l’Alliance.

C’est ainsi que la Bible mentionne plusieurs Alliances jusqu’à la dernière que Dieu a conclue avec Abraham (paix sur lui) assortie de la promesse faite à sa descendance d’en être le dépositaire et le témoin pour toutes les nations après lui et jusqu’à la fin des temps.

Les sens attestés de la notion de umma

La revue du terme « umma » et du pluriel « umam » dans le Coran et leurs différentes occurrences conduit à se faire une idée claire de ce qu’on pourrait en comprendre de façon pertinente et cohérente avec le sujet de l’Histoire de l’Alliance et du Salut. De cette recension, on retient ce qui suit : Communauté de foi9 ; communauté de coutume, de traditions et de pratiques10 ; Existence de plusieurs « umma »11 ; groupe d’humains et de « jinns »12 ; les « umam » qui se succèdent dans le temps13 ; Muhammad (bpslf) incarne une « umma »14 ; le concept de « umma wasatan » (Communauté médiane, du juste milieu)15 ; l’invocation d’Abraham pour une « umma muslima » (Communauté soumise à Dieu)16 ; chaque « umma » a reçu un « nazîr » (avertisseur)17 ; à chaque « umma » est envoyé un « rasûl » (messager de Dieu) qui en est le « chahîd » (Témoin) à charge ou à décharge18 ; chaque « umma » est concernée par un Livre révélé19 ; existence dans le passé d’une seule « umma » pour les humains puis des divergences sont survenues20 ; chaque « umma » a reçu des « munzirîn » (avertisseurs de châtiment pour les transgresseurs) et « mubachchirîn » (annonciateurs de Salut pour les fidèles)21 ; Muhammad (bpslf) est le Messager-Témoin de cette dernière « umma » inaugurée par sa mission et le Coran22 ; à lui seul, Abraham est une « umma » (modèle, guide, exemple)23 ; cette « umma » qui a fait son temps24 ; la notion de « ajal » (durée, délai) pour chaque « umma »25 chaque « umma » a son « mansakan » (culte et rituel propre)26

Les six piliers de la umma

Comment pourrait-on retrouver les « umam » qui se sont succédé dans le temps ? Difficile de répondre de façon catégorique et univoque à cette question. Mais, l’on peut, à tout le moins, se faire une idée des composantes d’une « umma » en raisonnant sur la base d’informations clés que nous fournit le Coran à savoir :

-Une communauté de foi 27 ;

-Un horizon temporel défini ;

-Un messager de Dieu et Témoin pour sa « Umma » ;

-Des prophètes avertisseurs et annonciateurs ;

-Un Livre révélé ;

-Un culte, une loi et une voie.

C’est ainsi que les commentateurs du Coran admettent qu’il y a eu une première « umma » qui a englobé les générations d’Adam (paix sur lui) à Noé (Nûh – paix sur lui), d’une durée de dix siècles. Si Noé (paix sur lui) est envoyé comme messager de Dieu, c’est que certains individus et groupes de la « umma » première ont commencé à dévier au sens de verser dans l’idolâtrie et autres transgressions des commandements de Dieu. (Coran 2 : 213) ; (Coran 10 : 19).

Le récit coranique sur Noé (paix sur lui) donne des informations sur l’état d’esprit, les propos et les comportements de son peuple envers Dieu et envers lui. Toujours, d’après ce que le Coran en dit, Noé (paix sur lui), messager de Dieu, a prêché durant 950 années, compte non tenu de son âge quand il a commencé son appel à l’islam, donc presque la même durée que celle de la première « umma », c’est-à-dire, d’Adam à lui.

Le « qawm » (peuple) de Noé (paix sur lui) qui est un sous-groupe de sa « umma » adore des idoles faites en sculptures de pieuses personnes décédées, se mettent en posture de défiance à l’égard de Dieu, de mépris à l’égard de Noé (paix sur lui) et des gens du peuple qui croient en lui, etc.

Le petit groupe de croyants et croyantes soumis qui suivent Noé constituent le noyau des fidèles à Dieu dans cette « umma » : ils adorent le vrai et unique Dieu et observent Ses commandements tels que les reçoit et le leur transmet Noé (paix sur lui).

Ce dernier est un « rasûl », messager de Dieu et en même temps le Témoin à charge ou à décharge de sa « umma », avertisseur de châtiment et de damnation contre les rebelles à la foi au vrai et unique Dieu et autres transgresseurs de Ses commandements et annonciateur de Salut aux fidèles qui rejettent l’idolâtrie et observent Sa Loi.

En tant que « rasûl » (messager), Noé (paix sur lui) a dû recevoir des commandements de Dieu sur la base de laquelle sa « umma » sera jugée par Dieu28.

De Noé à Abraham, la transition cyclique de l’humanité

Noé (paix sur lui), une partie de sa famille et quelques autres personnes de son peuple refondent une humanité insérée dans l’Alliance de foi au vrai et unique Dieu et l’observance de Ses commandements. C’est de là qu’est venue l’appellation de « second Adam » attribué à Noé. Il refonde une nouvelle humanité, mais aussi une nouvelle écologie avec les espèces29 en couple qu’il a reçu l’ordre d’embarquer dans l’arche.

Va suivre, pourrait-on dire, la « umma » d’Abraham (paix sur lui) marquée par l’invitation à l’islam qu’il va adresser à son peuple. On est alors dans une « umma » pour laquelle Abraham (paix sur lui) est le messager de Dieu et Son témoin. Juste rappeler que Dieu fait d’Abraham l’imam de l’humanité et établit une Alliance universelle avec lui.

Dès lors, le salut de l’humanité va se jouer comme une épreuve face aux exigences de l’Alliance entre Dieu et Abraham : croire au vrai et unique Dieu et observer ses commandements. Dieu promet à Abraham (paix sur lui) ceci que ce sont des justes et pieux de sa descendance qui seront les vecteurs de ladite Alliance.

Comme mentionné plus haut dans les « composantes » de la « umma », ce sont des « suhuf » (feuillets)30 d’Abraham (paix sur lui) qui vont contenir les commandements destinés à régir la vie cultuelle et civile de cette « umma ». Le Coran donne une indication sur cette « umma » que constituent Abraham, Ismaël, Isaac et Jacob (paix sur eux). (Coran 2 : 134).

Aussi, Abraham (paix sur lui) est à lui seul une « umma » et possède une « milla »31. C’est donc à travers l’Alliance Abrahamique que va se jouer le Salut de l’humanité avec des étapes, références scripturaires, événements et figures emblématiques qui vont se succéder jusqu’à la fin des temps ou les temps de la fin.

L’on pourrait considérer que la « umma » d’Abraham (paix sur lui) est formée des deux « moments » israélite et ismaélite. Le premier s’étend de Jacob à Jean (paix sur eux) et le deuxième et dernier est incarné par la personne de « Ahmad » (le plus loué – bpslf) annoncé par Jésus, fils de Marie (paix sur lui) qui occupe une position charnière entre les deux. Ces deux patriarches n’avaient enseigné rien d’autre que l’islam.

Le testament d’Abraham (paix sur lui) à ses enfants, tous ses enfants, leur disant que l’islam est la religion que Dieu leur a donnée et de ne mourir qu’en Lui étant soumis consacre définitivement ce que nous avons dit et redit à savoir que l’islam est l’autre nom de l’Alliance et du Salut.

L’héritage de Jacob

Sur son lit de mort, Jacob (paix sur lui) pose lui aussi une question décisive à ses enfants qui lui donnent la réponse attendue : ils s’engagent à rester attachés à la foi d’Abraham, d’Ismaël et d’Isaac (paix sur lui) au Dieu unique et de Lui rester soumis, une autre façon de dire qu’ils vont observer Ses commandements. (Coran 2 : 131-134).

La fonction de Jacob (paix sur lui) consiste apparemment à donner la lignée qui va porter l’Alliance Abrahamique pour un laps de temps même si on a vu comment le judaïsme a fini par croire que c’était sans condition et jusqu’à la fin des temps. Selon la Bible, Dieu a promis à Abraham et à sa descendance par la lignée de Jacob (paix sur eux), les terres de Canaan et que celle-ci sera tenue en esclavage dans un pays étranger qui n’est autre que l’Égypte.

Mais comment interpréter ce passage du peuple d’Israël en Égypte dans des conditions de servitude aussi dures et pendant des siècles ? Que peut-on savoir de la sagesse incommensurable de Dieu à propos de ce séjour aussi éprouvant pour le peuple d’Israël en Égypte ?

Ni la Bible, ni le Coran ne donne les « raisons » de ce séjour éprouvant et séculaire du peuple d’Israël en Égypte. N’empêche que nous pouvons tenter quelques explications.

On ne peut s’imaginer que c’est juste pour faire souffrir le peuple d’Israël que Dieu le laisse en esclavage en Égypte. Que non ! D’ailleurs, il ne faut pas oublier que le peuple d’Israël est bien installé dans un premier temps et respecté en Égypte. Ce n’est qu’après leur « montée » en puissance que le Pharaon décide de sévir.

L’on peut alors penser qu’il s’agit plus d’une mise à l’épreuve que d’autre chose. En d’autres termes, le message qui peut découler de l’épreuve d’esclavage pour le peuple d’Israël est que ce dernier ne doit pas se croire « intouchable » et autorisé à faire ce que bon lui semble au prétexte du statut de « peuple élu ».

Deuxième hypothèse explicative, c’est que le peuple d’Israël devait grandir, être organisé et avoir suffisamment de force démographique pour revenir s’installer en terre promise à condition de combattre pour la conquérir avec l’aide de Dieu. Cette montée en puissance était peu probable en terre de Canaan. Dieu a voulu faire goûter au peuple d’Israël le don de la liberté pour qu’il Lui soit à jamais reconnaissant et prêt à Le servir 32.

C’est donc le seul peuple dépositaire de l’Alliance Abrahamique universelle dont l’islam est l’autre nom 33 que Dieu a sauvé (comme Il le fera pour le prophète Muhammad (bpslf) lors de l’hégire 34), afin qu’il assure et assume sa « part » à partir de ce qui se passera au mont Sinaï. À cette fin, le peuple d’Israël devait être libre et s’installer par le « jihâd 35 » dans la terre promise.

La destinée des fils d’Israël

C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre le « fadl » (faveur) et la « ni’mah » (bienfait) accordés aux fils d’Israël dont le Coran fait mention à maintes reprises 36.

Mais ces distinctions données au peuple d’Israël sont toujours associées dans le Coran aux obligations de l’Alliance notamment du Sinaï comme nous en avons largement discuté plus haut. Dans ce cadre, le Coran a mentionné le manque de reconnaissance des fils d’Israël à l’égard de Dieu, aux moult violations des termes de l’Alliance et à la fausse croyance en un « peuple élu » qui serait à jamais impuni quoi qu’il fasse 37.

La fonction de Moïse (paix sur lui) sera d’être le libérateur du peuple d’Israël, de recevoir la Torah et d’être le premier Témoin de l’Alliance du Sinaï. D’abord, Dieu le sauve en tant que bébé dans des conditions désespérées pour sa mère et puis le fait accepter dans le palais du Pharaon, ennemi intraitable du peuple d’Israël. Ensuite, Moïse est soumis à l’épreuve de l’homicide involontaire et à l’exil vers « Madyan »38.

C’est sur le chemin du retour que Dieu lui parle et le fait messager pour délivrer le peuple d’Israël qui est le peuple de l’islam de l’époque. Il va assurer sa fonction qui se terminera aux portes de la terre promise. Moïse d’Égypte ne sera jamais Moïse de Canaan. Le Coran mentionne des « umma 39» dans la communauté de Moïse.

Dans le cadre de l’Alliance Abrahamique, la famille/descendance de « Amram » (âli ‘imrân) va avoir une fonction emblématique. En effet, c’est de la lignée d’Amram, fils de Lévi, fils de Jacob que seront issus Moïse et Aaron (paix sur eux) en Égypte et environ 1000 ans plus tard, Amram de Palestine et sa fille Marie, mère de Jésus fils de Marie (paix sur eux).

Quand Moïse et Aaron (paix sur eux) sont rappelés à Dieu aux portes de la terre promise, le peuple d’Israël finit quand même par y entrer. Même pour la désignation de leur premier roi en l’occurrence Saül (Tâlût) sur sa propre et insistante demande, le peuple d’Israël fait des siennes 40.

Les règnes emblématiques des rois-prophètes-juges que sont David et Salomon (paix sur eux) viennent confirmer la promesse de Dieu à Abraham (paix sur lui) d’accorder à sa descendance une royauté hors du commun. D’ailleurs, après Salomon, le peuple d’Israël va être confronté à des événements éprouvants notamment le traumatisme de la destruction du Temple par les troupes de Nabuchodonosor vers 587-586 av. J.-C. et l’exil forcé de la crème du peuple d’Israël à Babylone.

L’accomplissement de la promesse de Dieu

Dieu a respecté tout ce qu’Il a promis à Abraham et sa descendance (paix sur eux) dans le cadre de l’Alliance susmentionnée dont l’autre nom, nous le répétons, est « islam ». C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre ces versets clés :

« Et Abraham fut mis à l’épreuve par certaines prescriptions et dès qu’il les eut accomplies, Il dit : ‘Je vais faire de toi un imam pour les gens’. Il dit : ‘Et ma descendance ?’41 Il dit : ‘Mon Alliance (‘ahd) ne concerne pas les injustes’ » (Coran 2 : 124).

« Et lorsque Nous avons pris l’engagement des prophètes ainsi que de toi-même, de Noé, d’Abraham, de Moïse et de Jésus fils de Marie. Nous avons pris d’eux un engagement solennel » (Coran 33 : 7) ;

« Dis : ‘Nous croyons en Allah, en ce qui nous fut révélé et révélé à Abraham, Ismaël, Isaac, Jacob, et les Tribus et en ce qui a été donné à Moïse, à Jésus et aux prophètes de la part de la part de leur Seigneur. Nous ne faisons aucune différence entre eux et c’est à Lui que nous sommes soumis’. Et quiconque prend une religion autre que l’Islam, cela ne sera pas accepté de lui et dans l’au-delà, il fera partie des perdants » (Coran 3 : 84-85) ;

« Ce fut là ce que recommanda Abraham à ses fils ainsi que Jacob : ‘Ô mes fils, c’est Allah qui a choisi pour vous cette religion. Ne mourrez donc point que vous ne soyez des soumis’. Étiez-vous donc témoins quand Jacob, à l’article de la mort, eut dit à ses fils : ‘Qu’adorerez-vous après moi ?’ Ils répondirent : « Nous adorerons ton Dieu et le Dieu de tes pères, Abraham, Ismaël, et Isaac, un Dieu unique auquel nous sommes soumis. » (Coran 2 : 132-133) ;

« Certes, Allah a élu Adam, Noé, la famille d’Abraham, et la famille d’Amram au-dessus des mondes » (Coran 3 : 33) ;

« Quiconque désire une religion autre que l’Islam, cela ne sera pas accepté de lui et dans l’au-delà, il fera partie des perdants »
(Coran 3 : 85).

Pourquoi parler de muslimun ? 

Dans tous ces versets clés, si le terme « islam » est compris au sens de la religion de l’Alliance entre Dieu et l’humanité, et celui de « muslimûn » comme « ceux qui ont accepté de se soumettre aux exigences de l’Alliance », alors on sort de confusions et d’erreurs lourdes qui sont à la base des plus profondes divergences entre juifs, chrétiens et musulmans sur l’Histoire de l’Alliance et du Salut.

Dans cette perspective, tous les prophètes et messagers de Dieu (paix sur eux) ont eu pour religion l’islam et tous les croyants qui ont accepté de les suivre ont été /sont des « muslimûn » au sens de « soumis » à Dieu dans le cadre de l’Alliance dont les termes sont : croire au vrai et unique Dieu et observer Ses commandements.

Nous préférons la traduction de « muslimûn » par le mot « soumis » à celui de « musulmans » que l’histoire et la littérature ont fini de considérer comme les adeptes de la religion de Mahomet, le prophète des Arabes ! En vérité, le terme « soumis » sous-entendu à Dieu s’applique à tout fils et toute fille d’Adam qui accepte les termes de l’Alliance que Dieu a proposé à l’humanité depuis Adam (paix sur lui) et notamment à travers ces cinq plus grands prophètes et messagers : Noé, Abraham, Moïse, Jésus et Muhammad. (Coran 33 : 7).

C’est ainsi que le Coran a appelé « muslimûn » (soumis) tous les prophètes et messagers de Dieu ainsi que les autres croyants non humains comme les « jinns ». Donc le terme coranique de « islam » précède Muhammad et Abraham (paix sur eux) pour signifier tout simplement l’Alliance que Dieu a conclue avec l’humanité.

Il en vient que l’islam devient ce qu’il a été depuis à savoir la voie du Salut pour toute l’humanité et toute la « jinnité » dont les vecteurs ont été les prophètes et les messagers de Dieu d’Adam à Muhammad (paix sur eux). On n’est plus dans islam « religion des musulmans » ni le Coran « Livre sacré des musulmans » ni Muhammad « prophète des musulmans ».

Le portage de l’Alliance

Le Coran invite l’humanité à entrer dans l’Alliance avec Dieu afin d’être guidé vers la voie du Salut, la « sirâtal mustaqîm »42. Dans le verset qui suit, c’est le terme « silm »43 qui renvoie à paix qui est utilisé comme synonyme de « islam », car entrer dans cette Alliance est gage de Paix et de Salut si on en respecte les exigences et qu’on se repente pour les transgressions commises. (Coran 2 : 209).

C’est en toute cohérence que le verset nous dit que refuser d’entrer dans la voie du Salut, c’est choisir les voies de Satan. Dans la même veine, le messager de Dieu, Muhammad (bpslf) mettait dans les courriers qu’il envoyait aux souverains d’à côté : « aslim, taslam ». La traduction littérale de cette expression fondamentale et décisive par des expressions du genre « soumets-toi et tu as la paix » appauvrit le sens profond de cette invitation qui est la même que celle que les prophètes (paix sur lui) ont lancée à leurs époques respectives.

En effet, une mauvaise compréhension de cette expression a pour résultat de cacher ou dévoyer son véritable sens, lequel est étroitement lié à l’Alliance et de faire croire qu’il s’agit tout juste d’un ordre à se soumettre à Muhammad lui-même (bpslf). C’est pour éviter ce genre d’erreurs qu’on peut retrouver sur d’autres sujets relativement à l’islam, que nous proposons pour cette expression une traduction bien entendue perfectible comme : « Si tu acceptes l’islam, tu seras sauvé – ou si tu acceptes l’islam, ton salut est assuré ».

C’est ainsi qu’au temps d’Adam (paix sur lui), lui et ses enfants qui l’ont suivi ont constitué le peuple de l’islam, de même Noé (paix sur lui) 44 avec des membres de sa famille et d’autres croyants qui sont montés avec lui dans l’Arche constituaient le peuple de l’islam. À partir d’Abraham (paix sur lui), le « portage » de l’Alliance est domicilié dans sa descendance quand Dieu le fait imam de l’humanité.

Le Coran nous dit qu’Abraham a reçu des feuillets certainement contenant les obligations liées à l’Alliance 45 et qu’il n’était ni juif ni chrétien, mais tout simplement « muslim » (soumis) :

« Abraham ne fut ni juif ni chrétien, il fut un authentique soumis. Et il ne fut point du nombre des associationnistes 46. Certes les hommes les plus dignes de se réclamer d’Abraham sont ceux-là qui l’ont suivi, ainsi que ce prophète-ci 47, et ceux qui ont cru. Et Allah est certes l’Allié des croyants » (Coran 3 : 67-68).

Le parachèvement muhammadien  de l’islam

La lignée de Jacob (paix sur lui) a été pour un laps de temps qui va de lui à Jean (paix sur lui), en en charge de l’Alliance Abrahamique universelle comme en témoigne la question qui a servi de testament à ce dernier pour ces enfants 48. C’est ainsi que Joseph (paix sur lui) prie Dieu de lui accorder de ne mourir qu’en étant « muslim »49.

Au temps de Moïse (paix sur lui) 50, c’est le peuple d’Israël qui a été le peuple pivot de l’Alliance Abrahamique, donc de l’islam avec la réception de la Torah au mont Sinaï. Le dialogue entre le prophète-roi Salomon (paix sur lui) et cette reine puissante est empreint de référence à l’islam 51.

Au temps de Jésus, fils de Marie (paix sur lui), les fils d’Israël qui ont cru en lui et accepté son Évangile ont été le peuple de l’islam comme en atteste la profession de foi des apôtres qui le prennent à témoin 52. Jusqu’au temps de l’avènement de la « umma 53» de Muhammad (paix sur lui) et du Coran, la dernière, ce sont tous les croyants de toute l’humanité et de toute la jinnité54 qui constituent le peuple de l’islam :

« Aujourd’hui, J’ai parachevé votre religion, Je vous ai comblé de Mes bienfaits et J’ai agréé pour vous l’Islam comme religion… »
(Coran : 5 : 3).

Ahmad Kanté

Notes : 

1 Nous écrivons ce terme au sens conventionnel de religion alors que « Islam » est mis pour la communauté musulmane et sa civilisation

2 Terme apparu en français à partir du XVIe siècle et qui a fini par supplanter celui de « Mahométans »

3 Il ne peut s’agir que du prophète Muhammad (bsplf).

4 Ce terme renvoie aux tribus issues des 12 fils d’Israël.

5 Pas de différence entre les prophètes pour ce qui est du statut ou de ce qui fait prophète (nubuwwa) en tant que tel, ce qui n’exclut pas une différence de prééminence. Voir (Coran 2 : 253).

6 Les auteurs musulmans ont souvent préféré traduire « ‘ahd » par Engagement ou Pacte pour éviter de reprendre le terme Alliance qui porte la marque de la théologie chrétienne.

7 On trouve dans (Deutéronome 11 : 27-28) le même contenu.

8 (Coran 3 : 67).

9 (Coran 23 : 52 ; 21 : 92).

10 (Coran 43 : 22).

11 (Coran 23 : 44) ; (Coran 42 : 8)

12 (Coran 7 : 38).

13 (Coran 7 : 38).

14 (Coran 6 : 42).

15 (Coran 2 : 143).

16 (Coran 2 : 128).

17 (Coran 35 : 24).

18 (Coran 4 : 41) ; (Coran 22 : 78) ; (Coran 28 : 75) ; (Coran 16 : 36) ; (Coran 16 : 84) ; (Coran 40 : 5) ; (Coran 10 : 47 ; (Coran 23 : 44).

19 (Coran 45 : 28).

20 (Coran 2 :213), (Coran 10 : 19).

21 (Coran 2 : 213).

22 (Coran 4 : 41) ; (Coran 22 : 78).

23 (Coran 16 : 120).

24 (Coran 2 : 134).

25 (Coran 7 : 34) ; (Coran 10 : 49) ; (Coran 23 : 43).

26 (Coran 22 : 34) ; (Coran 22 : 67).

27 Qui transcende les identités autres.

28 La tradition juive parle de sept lois (commandements, préceptes) Noachiques ou Noachides : i) reconnaitre le vrai et unique Dieu ; ii) ne pas blasphémer contre Dieu ; iii) ne pas tuer ; iv) respecter les liens du mariage ; v) ne pas voler ; vi) ne pas couper une partie d’un animal vivant ; vii) établir la justice.

29 (Coran 11 : 40).

30 (Coran 88 : 14-19), (Coran 53 : 36-42).

31 (Voie spirituelle basée sur la foi au vrai et unique Dieu et l’obéissance à ses commandements) : (Coran 2 : 130), (Coran 2 : 135), (Coran 3 : 95), (Coran 4 : 125), (Coran 6 : 161), (Coran 16 : 123), (Coran 22 : 78).

32 (Exode 8 : 1).

33 (Coran 10 : 84).

34 Après 13 années d’appel à l’Islam, le messager de Dieu, Muhammad (bpslf) quitte la Mecque avec nombre de ses compagnons pour se rendre à « Yathrib », future Médine. Nombre de miracles vont accompagner cet exil, révélant l’intervention de Dieu notamment lors de l’épisode de la grotte où le prophète Muhammad (bpslf) et son compagnon Abu Bakr étaient à portée de leurs poursuivants et que le premier dise au second : « ne sois point affligé, Dieu est avec nous » (Coran 9 : 40). Le groupe de musulmans Mecquois qui a quitté sera appelé « muhâjirûn » (émigrés) et les musulmans Médinois qui les ont accueillis seront appelés « ansârs » (auxiliaires).

35 Combattre les peuples de Canaan pour y entrer et s’y installer.

36 (Coran 2 : 40), (Coran 2 : 47).

37 À la lumière du Coran comme de la Bible, il est clair que l’Alliance du Sinaï est une Alliance conditionnelle et par conséquent révocable. C’est l’Alliance que Dieu a conclue avec Abraham qui est définitive et pas révocable de par la promesse qu’Il a faite à Abraham de donner à sa descendance la « nubuwwa » (ce qui fait prophète), le « kitâb » (le Livre qui vient de Dieu), la « hikma » (la sagesse pour interpréter la Parole de Dieu) et le « mulk » (la royauté). On ne sait comment le christianisme s’est finalement retrouvé à soutenir la doctrine de l’irrévocabilité de l’Alliance entre Dieu et le peuple d’Israël !

38 Il existe des différences notoires entre le récit de la Bible et celui du Coran sur l’exil et le retour de Moïse en Égypte.

39 Au sens de communauté tribale et de groupe de personnes qui sont restés fidèles aux termes de l’Alliance du Sinaï (Coran 7 : 160), (Coran 7 : 167), (Coran 7 : 159).

40 (Coran 2 : 246-248).

41 Ici, il est question de la descendance d’Abraham dont Ismaël (paix sur lui) est le premier fils alors que dans la Bible, c’est Isaac (paix sur lui) et seulement lui qui est l’enfant de la promesse de l’Alliance.

42 (Coran 1 : 6-7).

43 Voir ( Jean 14 : 27).

44 (Coran 10 : 72).

45 (Coran 87 : 16-19).

46 Idolâtres.

47 Muhammad (bpslf).

48 (Coran 2 : 131-133), (Coran 3 : 68), voir aussi pour le prophète Loth (Coran 51 : 35-36).

49 (Coran 12 : 101).

50 (Coran 10 : 84), (Coran 7 : 121-126).

51 (Coran 27 : 29-31), (Coran 27 : 44).

52 (Coran 3 : 52), (Coran 5 : 111).

53 En font partie les « jinns », (Coran 72 : 14), Le prophète Muhammad (bpslf) est le premier à devoir se soumettre (Coran 6 : 14-15).

54 C’est le nom que nous donnons à la communauté des « jinns » qui sont doués de libre arbitre par analogie à l’humanité.

NEWSLETTER

PUBLICATIONS

À PROPOS

Newsletter

© Mizane.info 2017 Tous droits réservés.