Dans sa dernière chronique publiée sur Mizane.info, Daniel Milan revient sur les mesures et l’esprit portés par le discours d’Emmanuel Macron le 3 octobre dernier. Il dénonce un discours liberticide qui ouvrira la porte à une chasse aux sorcières.
Le train de mesures annoncées le 3 octobre 2020, et que le président Macron compte présenter le 9 décembre à l’Assemblée nationale dans son projet de loi, sous couvert de lutte contre le « séparatisme islamiste », imaginaire le plus souvent, vise en fait tous les musulmans.
Elles sont indignes, elles sont des atteintes intolérables et inacceptables aux libertés fondamentales des musulmans et de tous les citoyens.
Les mesures envisagées sont contraires aux articles de la Constitution stipulant l’égalité de traitement, de respect et de droit entre les citoyens.
Si loi il y a, elle entrera dans la longue liste des lois de fait anticonstitutionnelles établissant des inégalités, des discriminations entre les citoyens.
Ces mesures annoncées sont les prémices de chasses aux sorcières accrues à l’égard de tout ce qui peut être présenté ou « apparaître » comme « islamiste ».
Parmi ces mesures : il y a la scolarisation obligatoire des enfants dès 3 ans.
Le but non avoué est de soustraire ces enfants dès leur plus jeune âge à leur milieu familial et « communautaire » et les empêcher de les confier à une femme musulmane.
Prendre le contrôle des mosquées
Dans ce volet aussi, il est prévu de s’attaquer aux écoles privées musulmanes, donc, à la liberté d’enseignement, telle qu’elle a été conclue en France pour assurer la pacification des rapports entre la religion, l’Église et l’État.
L’avant projet de loi contenu dans ce discours prévoit de s’attaquer au financement des mosquées, aux libertés de prêche des imams, en les menaçant d’expulsion et de fermeture des mosquées, ce qui se fait déjà depuis des années sous prétexte que certains ne respecteraient pas les lois de la République (?), sans d’ailleurs qu’on n’ait la plupart du temps précisé les reproches faits.
Il est prévu d’empêcher de prétendus islamistes dont on ne donne aucune définition légale de prendre le contrôle de mosquées.
En clair, on imposera des imams et on interdira le choix démocratique des imams par les fidèles, ce qui vise à rendre la pratique de la religion musulmane comparable à celle qui existe dans certaines Eglises aux structures hiérarchisées et non démocratiques.
Cette police des imams et des mosquées sera confiée au CFCM, dont rien ne garantit le caractère représentatif et démocratique…
La loi prévoit également de s’attaquer à toutes les associations culturelles, sportives, de soutien scolaire, soupçonnées d’être dirigées ou a animées par des supposés « islamistes radicaux ».
Les droits et les libertés d’expression, d’association, de culte, d’opinion, d’enseignement, de travail, seront bafoués.
Ce sont pourtant des droits humains et civiques auxquels nos concitoyens musulmans ont droit comme tout autres citoyens.
Cette loi menace donc à terme toutes les catégories de citoyens qui auront des opinions religieuses, politiques, idéologiques ou sociales non conformes à celles du pouvoir politique du moment.
Ce qui menace à terme la liberté des associations, Églises, des partis, des syndicats et de tout autre regroupement démocratique des citoyens de la République.
Une chasse aux sorcières sans fin à grande échelle donc.
La bourgeoisie française et « les classes dangereuses »
Une politique d’inquisition prétendument anti-islamiste et en fait anti-islamique va se renforcer puisqu’elle vise les infiltrations supposées ou imaginées dans les milieux associatifs comme dans la fonction publique.
Il s’agit là d’une entreprise de légitimation de l’islamophobie, du racisme anti-musulman et de la délation islamophobe.
Ce dont au final n’importe quel citoyen pourra être victime puisque cette politique aura créé un précédent qu’on pourra étendre sans plus aucune limite.
Les droits de ne pas être sans cesse harcelé, humilié, suspecté, accusé, calomnié, criminalisé, persécuté, insulté, amalgamé, fiché, épié, surveillé, stigmatisé, discriminé font pourtant partie aussi des droits humains et du respect des êtres humains.
Il n’y a pas de « problème musulman » en France, il y a des problèmes sociaux, d’ingérences étrangères multiples et d’insécurité auxquels les pouvoirs actuels se sont révélés incapables de faire face, par contre, il y a bien un projet raciste, suprémaciste, séparatiste et islamophobe de politiciens qui travaillent l’opinion depuis des années, avec le soutien des médias, contre les musulmans, dont le but est de les criminaliser et de les exclure de toute la vie politique, démocratique et sociale de la France.
Sans doute parce que les musulmans sont largement concentrés dans ce que la haute bourgeoisie française nommait déjà au XIXe siècle « les classes dangereuses », c’est-à-dire les classes porteuses ne serait-ce que potentiellement d’un projet social critique envers l’ordre inégalitaire et usuraire qu’elles s’efforcent toujours de maintenir, et que le principe fondateur de leur religion ne reconnaît à aucun être humain et à aucune institution humaine le droit de transformer des êtres humains libres en citoyens passifs ou en sujets.
Daniel Milan
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