L’action du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin visant à exclure le prédicateur Hassan Iquioussen ressemble à celle des hypocrites pharisiens dénoncés par le Christ. Des propos défendus par le collectif catholique Anasthesis dans une tribune du Monde. Les détails sur Mizane.info.
« Jésus ne cesse, dans les Evangiles, de dénoncer les hypocrites : ils se targuent haut et fort de respecter mieux que quiconque la Loi, mais en foulent en réalité l’esprit, c’est-à-dire « la justice, la miséricorde et la fidélité » (…) L’hypocrite non seulement ne respecte pas l’esprit des principes, mais plus encore les distord et les affaiblit. Comment, lorsqu’on assiste aux gesticulations estivales du ministre de l’intérieur, présentées comme des actions décisives contre l’islamisme, l’antisémitisme et la misogynie, ne pas penser à ces figures du mal social et politique que sont les hypocrites ? » La charge est tombée comme un couperet. Les propos publiés par Le Monde sont signés par Anasthesis, un collectif de catholiques engagés politiquement autour d’une citoyenneté active témoignant d’un message évangélique absent de la société française. Et ils s’adressent au ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
Les pharisiens de la République
Dans leur tribune, les cadres catholiques reprochent au ministre de l’Intérieur une agitation verbale fallacieuse autour de la lutte contre l’antisémitisme, la misogynie, l’islamisme et pour la défense des valeurs républicaines.
« L’expulsion d’Hassan Iquioussen, écrivent-ils, annoncée par un tweet du ministre de l’intérieur fin juillet au nom de la lutte contre « un discours haineux à l’encontre des valeurs de la France », a toutes les caractéristiques d’une action hypocrite.
D’une part, elle méconnaît plusieurs principes structurants de notre Etat de droit : le droit, pour tout individu, au respect de sa vie privée et familiale, et le principe de séparation des pouvoirs. D’autre part, elle s’inscrit dans une rhétorique et une politique racistes, visant les musulmans, qui ne sont nullement en mesure – mais le veut-elle vraiment ? – d’apaiser les divisions qui traversent aujourd’hui la société française.
Hassan Iquioussen, quelque déplaisant qu’il soit – et, par les propos qu’il diffuse, il l’est fortement à nos yeux –, a des droits qui lui sont reconnus en tant qu’étranger, et en particulier en tant qu’étranger résidant depuis plus de vingt ans en France. »
La logique du bouc-émissaire
Au-delà du cas de Hassan Iquioussen, les membres d’Anasthesis dénoncent « un affaiblissement de l’Etat de droit », dans un contexte où « le gouvernement conduit depuis plusieurs années une politique visant à réduire la présence des musulmans dans l’espace public » par la restriction de leurs libertés publiques. Une référence notamment au vote de la loi contre le séparatisme invoquée par le ministre Darmanin.
Les signataires mettent aussi en garde contre une surenchère populiste inscrite dans la logique huntingtonienne de la guerre des civilisations qu’ils souhaitent conjurer.
« La logique du bouc émissaire – à laquelle s’opposent systématiquement la parole et la vie du Christ – ne résoudra en aucune manière les divisions profondes de la société française et les inégalités qui la fracturent, et dont l’antisémitisme et l’islamophobie sont parmi les manifestations les plus graves.
Nous refusons aujourd’hui d’être embarqués dans une « guerre de civilisations » qui ne dit pas son nom : seule « l’œuvre de la justice sera la paix » (Isaïe 31, 17). »
Le collectif Anasthesis est animé par Gabriel Amieux, travailleur associatif ; Camille Charrière, juriste et professionnelle de la santé et du social ; Guillaume Dezaunay, professeur de philosophie ; Jean-Victor Elie, professeur de philosophie ; Foucauld Giuliani, professeur de philosophie ; Benoît Sibille, doctorant en philosophie et Anne Waeles, professeure de philosophie.