Wang Zi-Ping.
Surnommé le « Lion du Kung Fu chinois », le grand maître musulman Wang Zi-Ping (1881 – 1973), issu de la minorité ethnique musulmane Hui, fut non seulement un adepte reconnu et respecté dans plusieurs disciplines martiales mais aussi un fervent musulman pratiquant le rite hanafite, soucieux des enseignements spirituels et traditionnels de l’Islam. Retour sur un personnage atypique ayant suscité admiration et inspiration au delà des frontières de Chine.
Né en 1881 dans la ville de Cangzhou dans la province du Hebei, Wang Zi-Ping, héritier d’un père et grand père pratiquant eux-mêmes les arts martiaux, est – dès son enfance – passionné par cette discipline. Malheureusement, ne souhaitant pas voir leur progéniture durement souffrir durant les entrainements ancestraux, ses pères refusèrent de lui enseigner. Wang Zi-Ping fit donc ses premiers pas seul avant de parcourir la Chine pour approfondir son entrainement.
Au cours de son voyage, il fut choisi et formé par le maître Wu Shu Yang Hong Xiu. Wang fut ainsi reconnu pour sa maîtrise de différentes disciplines tels que le Kung fu, le Wushu, le T’ai chi ch’uan ou encore le Pao Chuan.
Une personnalité militante et déterminée
On rapporte qu’au cours de ses jeunes années, ayant vécu la majeure partie de sa vie en Chine sous la pression impérialiste des grandes puissances européennes, Wang combattit dans la rébellion des Boxers (mouvement de l’union de la justice et de la concorde) – entre 1899 et 1901 – contre l’Alliance des huit nations impérialiste occidentale et japonaise étrangère. Puis il fut contraint à s’exiler de chez lui après la défaite de la révolte des boxers et leur suppression. Il devint, par la suite, élève du maître Yang Hongxiu dont il appris l’art de Chaquan.
Ces diverses anecdotes montrent la facette militante et engagé du jeune Wang Zi-Ping mais également son sens de l’effort pour acquérir les divers rudiments techniques afin d’obtenir une connaissance profonde des arts martiaux.
Respect des traditions et des enseignements de l’Islam
Le maître Wang Zi-Ping fut également connu pour son attachement à l’Islam et aux traditions spirituelles de la minorité ethnique Hui. Plusieurs anecdotes font mentions de son dévouement pour sa foi. On rapporte notamment qu’il avait coutume de soulever de lourdes pierres tout en récitant des formules de « dhikr » et du Coran.
Wang remporta de nombreux combats contre des combattants russes, américains, allemands et japonais. Il y a également cette célèbre histoire, témoignant de son attachement à l’Islam et ses différents symboles, lorsque des Allemands voulurent s’approprier les portes antiques de la mosquée Qinzhou (situé dans la province du Shandong), Wang Zi-ping s’y opposa. Les Allemands le défièrent alors à un concours d’haltérophilie. Wang triompha et les Allemands prirent la poudre d’escampette.
Ces divers duels lui attirèrent un grand nombre d’étudiants qui voulurent s’entraîner sous sa direction, propageant, par la même occasion, l’islam aux quatre coins de la Chine. En réalité, les arts martiaux et la tradition islamique partagent un lien et une histoire commune. Tous deux contiennent les moyens traditionnels pour atteindre des objectifs aussi spirituels que culturels. Agissant comme un reflet l’un envers l’autre, la foi musulmane et les arts martiaux s’évertuent à préserver une haute moralité et un patrimoine chinois inaltéré.
Une stature reconnue et des œuvres abondantes
Wang Zi-ping est l’auteur de nombreux ouvrages compilant des exercices d’arts martiaux. Il développa des méthodologies martiales tel que « Quan Shr Er Shr Fa » (méthode des vingt poings) ainsi que « Ching Long Jian » (épée du dragon vert). Il créa, fort de ses connaissances traditionnelles en médecine chinoise, un régime d’exercice ayant pour finalité la garantie d’une longue vie.
Wang reçut plusieurs distinction dès 1928. Il fut nommé chef de la division Shaolin – Kung Fu de l’Institut des arts martiaux et fut également vice-président de l’Association chinoise de Wushu. Suite à la proclamation de la Chine populaire en 1949, il fut intronisé en héros et nommé député à l’Assemblée populaire de Shanghai, vice-président de l’Association nationale Wh Shu et membre de la Fédération chinoise des sports. Il fut également juge dans des compétitions nationales sportive pour les arts martiaux et la lutte.
Jusqu’à un âge avancé, Wang continua à pratiquer et enseigner les arts martiaux jusqu’aux confins de la Birmanie. Il décéda, après avoir mené une vie bien remplie, à l’âge de 93 ans en 1973. Il continue aujourd’hui à être une source intarissable de motivation et d’inspiration pour de nombreux adeptes des arts martiaux. Son nom et ses œuvres restent gravés dans le patrimoine historique de la Chine.
Ibrahim Madras